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La politique européenne de concurrence révisée à l'aune de la transition écologique et numérique

Affaires - Droit économique
Environnement & qualité - Environnement
13/12/2021
Le 18 novembre 2021, la Commission européenne a rendu publique une communication très attendue sur le futur de la politique européenne de concurrence. Le soutien à l'économie dans le cadre de la sortie de la crise Covid, les enjeux environnementaux et le développement de l'économie digitale sont au cœur de ses préoccupations et vont guider la refonte des règles aujourd'hui applicables en matière d'aides d'État, de pratiques anticoncurrentielles et de contrôle des concentrations.
Rédigé sous la direction de Claudie Boiteau, en partenariat avec le Master Droit et régulation des marchés de l’Université Paris-Dauphine
 
Maintien de l’encadrement temporaire
 
La Commission européenne prolonge l’assouplissement des règles applicables en matière d’aides d’État. L’encadrement temporaire fait l’objet d’une sixième modification et sera maintenu jusqu’au 30 juin 2022 afin d’assurer une reprise progressive de l’économie (« Temporary Framework for State aid measures to support the economy in the current COVID-19 outbreak »). Il sera désormais accompagné de deux nouveaux dispositifs qui visent à encourager les investissements et garantir des liquidités aux entreprises.
 
Orientation des aides
 
Les États membres sont tout d’abord invités à mettre en place des régimes d’aides dans les secteurs qui contribueront à la transition environnementale et numérique. Dans une liste de suggestions, la Commission encourage notamment les investissements dans le déploiement et la mise à niveau d’infrastructures nécessaires à la numérisation des entreprises, l’adaptation des lignes de production, la création de nouvelles lignes de production pour surmonter les pénuries, le remplacement d’équipements anciens, ou encore l’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments. La finalité est donc de mobiliser les investissements privés qui s’inscrivent dans ses objectifs environnementaux.
 
En outre, les États membres pourront mobiliser des fonds à destination des petites et moyennes entreprises (PME) et des entreprises de taille intermédiaire (ETI) et se porter garants pour des prêts dans le cadre du mécanisme de soutien à la solvabilité, prévu jusqu’au 31 décembre 2023.
 
Transition numérique et transition écologique : nouveaux piliers de la politique de concurrence
 
Parallèlement à ces mesures conjoncturelles, la Commission a pour ambition de transformer la politique de concurrence européenne afin que celle-ci s'adapte aux enjeux qui touchent le marché unique : la transition numérique et écologique en deviennent les deux grands piliers. Un nouveau corpus de règles en faveur de l'investissement numérique va dès lors être mis en place.
 
La Commission souhaite notamment favoriser la coopération entre les opérateurs privés et cela se matérialisera par des orientations données dans le cadre de la révision des lignes directrices horizontales. En matière de contrôle des concentrations, la Commission publie des orientations sur l'application de l'article 22 du règlement sur les concentrations (Règl. (CE) no 139/2004, 20 janv. 2004), afin de lutter contre les acquisitions prédatrices, touchant essentiellement le secteur du numérique.
 
La révision du règlement général d'exemption par catégorie (RGEC ; Règl. (UE) no 651/2014, 17 juin 2014), et la mise à jour de la communication sur les projets importants d'intérêt européen communs (PIIEC), tous deux attendus pour 2022, permettront davantage de soutien public aux projets qui prennent part à la réalisation des politiques environnementales européennes. De nouvelles lignes directrices concernant les aides d’État en faveur du climat, de l’énergie et de l’environnement accompagneront les textes annoncés.
 
Plus largement, la Commission rappelle que la politique de concurrence ne peut pas être pensée de manière isolée, mais qu'elle doit s'articuler avec d'autres outils européens. Le Digital Markets Act, aujourd'hui en discussion, permettra en ce sens la mise en place d'un cadre de contrôle ex ante des grandes plateformes numériques qui sera complémentaire du contrôle ex post du droit de la concurrence.
 
Par cette dernière communication, la Commission européenne projette de mettre la politique de concurrence au service de la construction d'un marché unique compétitif, notamment dans le secteur numérique, tout en tenant compte des objectifs du Green Deal Européen.
 
Un calendrier des réformes présentées est fourni en annexe de la communication.
 
Par Ivaylo Savov et Carla Sasiela
Source : Actualités du droit