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Réforme de la Justice : des avocats déterminés à ne rien laisser passer

Pénal - Vie judiciaire
Civil - Procédure civile et voies d'exécution
19/03/2018
Lors de sa dernière assemblée générale, qui s’est tenue les 16 et 17 mars 2018, le Conseil national des barreaux (CNB) a décidé de poursuivre le dialogue avec la Chancellerie sur l’avant-projet de loi de programmation de la justice, tout en restant mobilisé et vigilant au regard de la méthode adoptée jusqu’à présent.
« Nous avons dit à la Chancellerie notre colère quant à la méthode retenue par le gouvernement », a déclaré Christiane Féral-Schuhl, présidente du CNB, lors de l’ouverture de l’assemblée générale le 16 mars. Rien d’étonnant à cela : après avoir promis à la profession la transmission d’un texte au 15 février, puis au 1er mars, pour concertation, le ministère de la Justice lui a finalement communiqué un texte quasi-finalisé le 9 mars, au moment même où le Premier ministre faisait les annonces publiques (voir notre article du 14/03/18 : Projet de loi de programmation pour la justice : le CNB dénonce « un texte inacceptable »).

Un léger recul du gouvernement

Prompt à réagir, le CNB a obtenu dès le 15 mars, après d'âpres négociations, des modifications sur deux points :

– le retrait du projet de loi des dispositions réformant la procédure de saisie immobilière, un retrait provisoire car cette réforme « reviendra via les ordonnances » ;

– la réintégration de la présence obligatoire de l'avocat dans la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC).

« Nous n’avons transigé sur rien en échange de ce qui a été obtenu », a tenu à préciser Christiane Féral-Schuhl, à l’adresse des avocats qui seraient tentés de critiquer l’action de l’institution, avant d’ajouter avec une certaine fierté : « Nous avons fait reculer le gouvernement sur un texte qui avait été validé par Matignon. Les avocats sont donc le premier corps constitué dans la jeune histoire du quinquennat Macron à avoir fait reculer l’exécutif sur un aspect essentiel de la réforme ». Elle n’entend pas pour autant se reposer sur ses lauriers : « C’est un premier round de gagné et il faut maintenant gagner les neuf prochains ».

Une fenêtre de tir jusqu’au 11 avril

Aussi, a-t-elle poursuivi, « au civil, nous avons des possibilités réelles de continuer à infléchir le texte de nos propositions », notamment sur l’encadrement des legaltech. Le CNB va donc poursuivre ses travaux sur ce point avec la Chancellerie. « Sur la carte judiciaire, le gouvernement botte en touche en renvoyant aux ordonnances », tout en multipliant les messages rassurants à l’égard des avocats. Fort de ce constat, le CNB entend rester vigilant.

Enfin, sur le plan pénal, Christiane Féral-Schuhl a indiqué que « la position politique du gouvernement est fermée » : « le ministère de l’Intérieur a gagné par KO contre la Chancellerie » et a réussi à faire prévaloir une vision sécuritaire. Une position que le CNB ne tolèrera pas : c’est « un texte qui dénie le juge, le citoyen, la victime et porte une atteinte manifeste aux libertés individuelles », a déclaré Marie-Aimée Peyron, bâtonnier de Paris.

Les avocats ont maintenant « une fenêtre de tir de 15 jours », a affirmé Christiane Féral-Schuhl, car le texte qui va être transmis au Conseil d’État au plus tard le 21 mars, pourra encore « être amendé jusqu’au 11 avril », pour une présentation en Conseil des ministres le 18 avril.

Maintenir la pression malgré les négociations

Même s’ils comptent poursuivre les négociations avec la Chancellerie, les avocats entendent bien maintenir la pression sur le gouvernement.

Aux termes d’une résolution votée le 17 mars, le CNB appelle l'ensemble des barreaux et des avocats de France à une journée d'action et de mobilisation le 21 mars, notamment pour exiger du gouvernement « d’être immédiatement associé à la rédaction des projets d’ordonnances et de décrets ». Ces actions seront mises en œuvre barreau par barreau, selon les modalités choisies par les bâtonniers.

En outre, les avocats ont été invités à se joindre à la journée de manifestation organisée le 30 mars par l'intersyndicale de la justice.
Source : Actualités du droit