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Point de départ du délai de prescription de l’action en responsabilité contre le liquidateur amiable

Civil - Procédure civile et voies d'exécution
Affaires - Commercial
08/03/2019
Le 20 février 2019, la Cour de cassation a apporté une précision relative au point de départ du délai de prescription de l’action en responsabilité contre le liquidateur amiable.

Si l'action en responsabilité contre le liquidateur amiable se prescrit par trois ans à compter du fait dommageable ou, s'il a été dissimulé, de sa révélation, lorsque la créance contre la société liquidée n'est établie que postérieurement à cette date, le délai de prescription de l'action engagée par le créancier contre le liquidateur amiable de cette société au titre des fautes qu'il aurait commises dans l'exercice de ses fonctions commence à courir le jour où les droits du créancier ont été reconnus par une décision de justice passée en force de chose jugée, au sens de l'article 500 du Code de procédure civile. Tel est l’enseignement d’un arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 20 février 2019 (v. déjà Cass. com., 25 juin 2013, n° 12-19.173, P+B).

En l’espèce, après avoir démissionné de ses fonctions d'agent général d'assurances, une société a perçu une partie de l'indemnité prévue au contrat en contrepartie d'une interdiction de rétablissement temporaire. Soutenant que cette dernière avait poursuivi indirectement ses activités après sa démission, la compagnie d’assurance, mandante, a suspendu le paiement du solde de l'indemnité puis l'a assignée le 19 juillet 2004 en remboursement du montant de l'indemnité versée. Le 18 juillet 2005, l'assemblée générale de la société mandataire a décidé sa liquidation amiable et désigné son gérant en qualité de liquidateur. Un jugement du 3 mai 2006 a retenu la responsabilité pour faute de cette société envers la mandante. L’assemblée générale de la société mandataire, convoquée le 4 mai 2006 par son liquidateur a décidé de distribuer des dividendes. Par un arrêt du 12 janvier 2009, devenu irrévocable, elle a été condamnée à restituer à la mandante une partie de l'indemnité compensatrice qu'elle avait perçue. Soutenant que le liquidateur avait commis diverses fautes à l'origine du non-paiement de sa créance, la mandante l'a assigné, le 30 août 2012, en réparation de son préjudice. Le liquidateur a alors opposé la fin de non-recevoir tirée de la prescription triennale applicable à l'action en responsabilité du liquidateur amiable.

La cour d’appel a déclaré l’action non prescrite. Elle retient, à cet effet, que le délai de prescription ne peut courir qu'à compter du jour où les droits de la victime du fait dommageable imputé au liquidateur ont été définitivement reconnus par une décision de justice. Or, l'action en responsabilité avait donné lieu à un jugement puis à un arrêt de la cour d'appel le 12 janvier 2009 et, à titre d'épilogue, au rejet, le 1er juillet 2010, du pourvoi contre cet arrêt, de sorte, selon les juges du fond que l'action introduite, le 30 août 2012, n'était pas prescrite.

Saisie d’un pourvoi, la Cour de cassation, énonçant le principe précité, censure l’arrêt d’appel au visa des articles L. 237-12 et L. 225-254 du Code de commerce : en statuant ainsi, alors que, dans l'hypothèse où la prescription ne court que du jour où les droits de la victime du fait dommageable imputé au liquidateur ont été reconnus par une décision de justice, le point de départ de la prescription est le jour où ces droits ont été reconnus par une décision passée en force de chose jugée, au sens de l'article 500 du Code de procédure civile, la cour d'appel a violé les textes susvisés. En définitive, le délai de prescription avait donc couru, en l’espèce, à compter de l’arrêt d’appel rendu le 12 janvier 2009 ; l’action introduite le 30 août 2012 était donc bien prescrite.

Par Vincent Téchené

Source : Actualités du droit